La société est-elle capable d’accepter de garder en mémoire, et donc sous ses yeux, les traces de ses traumatismes et de ses erreurs ?
Tel un personnage de western, Rambo est un héros solitaire, voyageant de ville en ville, sans problème apparent. Ancien combattant du Viêt-nam, il est condamné au vagabondage, nulle part chez lui, partout mal reçu. La réinsertion semble impossible. C’est le souvenir violent de la torture et la mort de tous ses compagnons d’infortune qui fissurent le roc. Lézardé, il bascule.
Ted Kotcheff signe avec Rambo un film d’action pure, où s’entrechoquent sang, cris, bruits, fureur et instincts primitifs de survie. La réalisation nerveuse du cinéaste sert un propos à mi-chemin entre film militant comme Le Retour (Coming Home, 1978) de Hal Ashby et film dits “de guerre” comme Voyage au bout de l’enfer (The Deer Hunter, 1978) de Michael Cimino. Dans cette Amérique de la « moral majority », John Rambo est l’image même de cette guerre sans gloire, hier héros enrôlé de force, aujourd’hui paria de la société. Il est l’émanation d’une culpabilité naissante, interdit de séjour dans cette petite ville tranquille. Rambo est ainsi également une satire de ces comportements provinciaux, du souhait de rester “entre soi”. L’arrivée de John Rambo en ville est l’occasion inespérée pour les petits notables, et en premier lieu le shérif Will Teasle, d’exercer enfin les pouvoirs qui leur ont été accordés et de se lancer dans une lâche et interminable chasse à l’homme.
La nature a une place très importante dans Rambo. Elle est la protection, le rempart contre l’ennemi. John Rambo fuit la ville et son camouflage social, pour se réfugier dans celui qu’il appréhende parfaitement, celui pour lequel il a été formé. Dans la grande tradition des films de l’Ouest américain, l’homme ne fait plus qu’un avec la nature, un retour aux sources et à l’instinct animal.
« La force visuelle et sonore de ce film, la succession des évènements, la dramatisation de cet engrenage infernal et la démesure qui existe entre le pourquoi et le comment dans cette affaire démentielle, a quelque chose d’effrayant et de désespérant. Comment alors souscrire au comportement du “héros” ? L’arrêt sur image final de Sylvester Stallone regardant derrière lui après un travelling latéral nous laisse une impression de malaise. Pourrait-il un jour regarder devant lui ? “It’s a long road” dit la chanson de Dan Hill que l’on entend alors. » (Gérard Camy, Jeune Cinéma, n° 150, avril 1983)
Qui pour jouer Rambo ?
De nombreux acteurs approchés pour le rôle de Rambo ont décliné l’offre : Steve McQueen, Al Pacino, Gene Hackman, Dustin Hoffman, Nick Nolte, Kris Kristofferson, Jeff Bridges, Robert De Niro, Michael Douglas et Terence Hill… La plupart trouvait le scénario trop violent.
Stallone scénariste de la série
L’acteur, incarnation de Rambo, est également coscénariste de ce premier épisode, ainsi que des deux suites composant la série. Si Rambo évoque les séquelles de la guerre du Viêt-nam, les deux autres épisodes s’imprègnent ouvertement de l’anti-communisme de l’Amérique reaganienne.
Le roman
David Morrell est professeur à l’université de l’Iowa lorsqu’il publie son roman Rambo en 1972. Il a vu certains de ses élèves partir au front et en revenir détruits, incapables de se réinsérer dans une Amérique devenue moralisatrice.
Rambo (First Blood )
États-Unis, 1982, 1h33, couleurs (Technicolor), format 2.35
Réalisation : Ted Kotcheff
Scénario : Michael Kozoll, William Sackheim, Sylvester Stallone, d’après le roman Rambo de David Morrell
Photo : Andrew Laszlo
Musique : Jerry Goldsmith
Montage : Joan E. Chapman
Décors : Wolf Kroeger
Costumes : Tom Bronson
Production : Buzz Feitshans, Anabasis N.V., Elcajo Productions
Interprètes : Sylvester Stallone (John Rambo), Richard Crenna (le colonel Trautman), Brian Dennehy (le shérif Will Teasle), Bill McKinney (le capitaine Kern), Jack Starrett (Galt), Michael Talbott (Balford), Chris Mulkey (Ward), John McLiam (Orval), Alf Humphreys (Lester), David Crowley (Shingleton), David Caruso (Mitch), Patrick Stack (le lieutenant Morgen), Don MacKay (Preston), Charles A. Tamburro (le pilote), David Petersen (le soldat), Craig Huston (l’opérateur radio)
Sortie aux États-Unis : 22 octobre 1982
Sortie en France : 2 mars 1983
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