Billetterie

Portrait d’une enfant déchue

Puzzle of a Downfall Child

de Jerry Schatzberg , États-Unis , 1970

Lou Andreas Sand (Faye Dunaway) est ancien mannequin. Brisée par le milieu de la mode, elle s’est réfugiée dans une maison au bord de l’Atlantique, où elle consacre sa vie à la peinture et à la sculpture. Lorsqu’elle cherche à reconstituer le puzzle de sa jeunesse, son ami Aaron Reinhardt (Barry Primus) la pousse à se livrer sur un magnétophone. Il en résulte une mosaïque de souvenirs où la réalité est soumise aux caprices de l’imagination et de la mythomanie...

Bénéficiant d’attachés de presse offensifs et érudits (Pierre Rissient et Bertrand Tavernier, pas encore cinéaste, qui compare Faye Dunaway à une actrice bergmanienne), le film causa à sa sortie l’émoi des meilleurs spécialistes : « Jamais sans doute depuis Le Garçon aux cheveux verts (The Boy with Green Hair, Joseph Losey, 1948), une première œuvre américaine n’avait témoigné d’une maîtrise aussi confondante, écrit Michel Ciment dans Positif.


ENFANT DECHUE (1970)

Portrait d’une enfant déchue possède en commun avec Joseph Losey cet art de montrer en toute lucidité l’incroyable profondeur d’une blessure secrète. » Ciment restera fidèle à Schatzberg, jusqu’à lui consacrer un livre : De la photographie au cinéma (Le Chêne). Avec Puzzle le photographe Jerry Schatzberg vient en effet de réussir son passage derrière la caméra, même son sujet conserve une dernière trace de son ancienne vie : « La photographie, dit-il, a exercé mon œil et mon esprit, elle m’a enseigné à penser. » Dans ces années 1970 qui voient la nouvelle génération du cinéma américain témoigner des désillusions de l’Amérique (au même moment, Jane Fonda, en call-girl dans Klute d’Alan Pakula, livre également ses confessions à son psychanalyste), Jerry Schatzberg évoque un système où même ceux qui le contrôlent peuvent en devenir victimes. Pour Lou, le succès n’y aura rien changé, elle connaîtra l’exclusion par le milieu même qui l’a façonnée et détruite. Schatzberg opte pour une mise en scène audacieuse, où les défis sonores rivalisent avec un récit original, à tel point qu’un lien particulier se crée avec le spectateur, qui seul accède aux représentations mentales de l’héroïne. Portrait d’une enfant déchue est un film qui a marqué son époque.
« Ce cinéma intime et ardent est marqué par un sens très sûr de la beauté : beauté des cadrages, beauté des déplacements et des gestes, beauté des ruptures de ton. C'est un des films les plus tragiques qui soient, mais Schatzberg y exprime sa compassion et son refus, dans cet univers de la perdition et de la répétition, d'exclure toute possibilité d'une dynamique des sentiments. » (Michel Ciment, Shatzberg, De la photo au cinéma).

Faye Dunaway
Un clin d’œil à sa longue filmographie suffit pour s’en convaincre : des grands cinéastes de sa génération, Faye Dunaway n’a manqué  quasi-personne et personne ne lui a manqué (car Scorsese, Coppola ou Cimino arrivent un peu plus tard) : Arthur Penn, Elia Kazan,  John Frankenheimer, Richard Lester, Roman Polanski,  Sidney Pollack,  Norman Jewison, Sidney Lumet. Et Emir Kusturica lui donnera  un très beau rôle dans Arizona Dream (1993)

Cohérence d’une œuvre
Panique à Needle Park, second film de Jerry Schatzberg, est sorti en france avant Portrait d’une enfant déchue, entraînant une méprise de la critique. Michel Capdenac (Les Lettres Françaises, 1972) traduit cette confusion : « Cette intervention dans la chronologie d’une œuvre a pu fausser en partie notre lecture. Il apparaît, à la lumière de Puzzle et de sa préséance, que le propos de Schatzberg était au fond plus vaste et ambitieux qu’on ne pouvait le croire, ses ramifications sociologiques et métaphysiques plus étendues. »

De la photographie au cinéma
Jerry Schatzberg est photographe de mode lorsqu’il rencontre Ann Saint-Marie, top model qui traverse une dépression. « C’est la raison pour laquelle je suis devenu cinéaste. J’ai travaillé avec elle dans cette épreuve qu’elle traversait. J’ai vu d’autres mannequins devenir junkies, ou se suicider. C’est un milieu qui rend très fragile. Or, je voulais raconter cette histoire et n’étais pas capable de l’écrire. les photos, là, ne suffisaient pas.»

Lou Andreas-Salomé
Le personnage de Lou Andreas Sand fait référence à la romancière et psychanalyste Lou Andreas-Salomé (1861-1937), muse et amie de Nietzsche et Freud ou encore la maîtresse de Rainer Maria Rilke. Carol Eastman, la scénariste de Portrait d’une enfant déchue, signe ici une filiation marquée entre l’héroïne du film et cette féministe moderne avant son temps, dont la vie intime fut mystérieuse.

Portrait d’une enfant déchue (Puzzle of a Downfall Child )
États-Unis, 1970, 1h45, couleur, format 1.85
Réalisation : Jerry Schatzberg
Scénario : Jerry Schatzberg, Adrian Joyce
Assistants à la réalisation : Robert Schneider, Martin Miller
Photo : Adam Holender
Musique : Michael Small
Montage : Evan A. Lottman
Décors : Hubert J. Oates
Costumes : Jo Ynocencio, Terry Leong
Production : John C. Foreman, Jerry Schatzberg et Paul Newman & Joanne Woodward (non crédités)  
Interprètes : Faye Dunaway (Lou Andreas Sand), Barry Primus (Aaron Reinhardt), Viveca Lindfors (Pauline Galba), Barry Morse (Dr Galba), Roy Scheider (Mark), Ruth Jackson (Barbara Casey), John Heffernan (Dr Sherman), Sydney Walker (psychiatre), Clark Burckhalter (Davy Bright), Shirley Rich (Peggy McCavage)

Sortie aux États-Unis : 16 décembre 1970
Sortie en France : 30 janvier 1972

FILM RESTAURÉ
Universal Pictures
Carlotta

Restauration faite par les laboratoires d'Universal Pictures à Los Angeles




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