Avant de devenir un cinéaste très influent d’Hollywood et le réalisateur du célèbre – et triplement oscarisé – Casablanca (1942), Michael Curtiz était Manó Kertész Kaminer, jeune homme né dans une famille juive de Budapest. Après des études à l'Académie royale de théâtre et d’art, il débute une carrière d’acteur et de metteur en scène sous le nom de Mihály Kertész, et devient membre de la troupe du Magyar Szinhaz de Budapest.
C’est pour son travail au théâtre qu’il découvre le métier de cinéaste, et qu’il tourne quelques scènes insérées dans ses propres mises en scène. Cette pratique très en vogue à l’époque permettait de figurer les rêves ou pensées des comédiens sur scène. Le cinéma est encore bien rudimentaire, et Curtiz décide d’effectuer un séjour au Danemark, au sein de la Nordisk (société qui inondait alors l’empire austro-hongrois de ses productions), afin d’améliorer sa technique. En 1907, il avait confié à un ami comédien : « [Le cinéma] offre des perspectives merveilleuses. Il offre des possibilités que les dimensions réduites du théâtre ne pourront jamais nous offrir. » (Positif, n° 635, janvier 2014). 1912 marque le début de la carrière de Curtiz : il enchaîne de nombreux films (quarante-cinq entre 1912 et 1919), dont très peu survivront aux assauts du temps. En 1914, il rencontre Jénö Janovics, ingénieur, docteur en lettres et directeur du théâtre de Kolozsvar. L’homme se laisse tenter par l’aventure cinématographique et prend la direction de la Proja. À un rythme effréné, les films sortent des studios de Kolozsvar, souvent adaptés d’œuvres littéraires hongroises ou étrangères, dont les interprètes sont issus des planches du théâtre de Janovics.
L’Indésirable, un des très rares films de Curtiz rescapé, a été tourné à l’été 1914, pendant la pause de la saison théâtrale, juste avant le début de la Première Guerre mondiale. Ce film est un drame villageois, populaire, mais où l’on sent déjà les prémices du cinéma de Curtiz, bien plus habile et subtil que la production maladroite de l’époque.
Cent ans après, un témoignage unique de la prolifique mais invisible période européenne de cet Américain d’adoption, qui sera un jour d’été 1925 déniché par Harry Warner, venu chercher sur le vieux continent de nouveaux talents pour sa firme en plein développement.
Parcours intraçable
Beaucoup d’erreurs et d’approximations circuleront à propos de la jeunesse et de la période européenne de Michael Curtiz. C’est peut-être dû à la pratique approximative par le cinéaste de l’anglais lorsqu’il débarque aux États-Unis. La légende dit que pendant son voyage en bateau vers le Nouveau Monde, il aurait travaillé son anglais, apprenant de nombreuses listes de mots…
Sur le sol américain
L’Indésirable fut projeté aux États-Unis au cours des années 1920. Il devient ainsi un des tous premiers films hongrois exporté sur le marché américain.
Dans tous les bons bureaux de tabac !
Le jeune Mihály Kertész se fait connaitre du grand public grâce à son rôle dans la pièce L’Aiglon d’Edmond Rostand. Une célébrité telle qu’il était apparemment possible d’acheter des photos du jeune homme dans tous les commerces et mêmes dans les bureaux de tabac…
L’Indésirable (A Tolonc )
Hongrie, 1914, 1h08, noir et blanc, format 1.33
Réalisation : Mihály Kertész
Scénario : Jénö Janovics, d’après la pièce d’Ede Tóth
Photo : László Fekete
Montage : Mihály Kertész
Production : Jénö Janovics
Interprètes : Lili Berky (Liszka), Várkonyi Mihály (Miklós), Mari Jászai (Sára), Andor Szakács (Pál), Gyula Nagy (Kontra Fridolin), Mariska Simon (Kontráné, la mère de Miklós), István Szentgyörgyi (Mrawcsák), Alajos Mészáros (un gentilhomme), Kató Berky (l’épouse du gentilhomme), Elemér Hetényi (le majordome), István Gálosi (Ábris, le valet), Endre Kertész (Lõrinc, un jeune juif), Adorján Nagy (l'officier de police), Mihály Fekete (le directeur de prison), József Berky (le greffier)
Sortie en Hongrie : 20 mars 1915
FILM RESTAURÉ
Hungarian National Film Fund
Restauré par le Hungarian National Film Fund à partir d'une copie trouvée à New York en 2008. La restauration a débuté dans des laboratoires néerlandais puis new-yorkais avant d'être finalisée en Hongrie.
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