Billetterie

Horizons perdus

Lost Horizon

de Frank Capra , États-Unis , 1937

Robert Conway (Ronald Colman), grand diplomate en poste en Chine, doit quitter le pays où vient d’éclater une révolution. Avec quatre de ses compatriotes, il prend le dernier avion pour la Grande-Bretagne. Mais l’avion est détourné vers le Tibet voisin et, après plusieurs incidents, ils arrivent à Shangri-La, inaccessible lamaserie, sorte de paradis perdu au sein des pics enneigés de l’Himalaya, isolée du reste du monde. Les habitants, à la recherche de la sagesse éternelle, y vivent dans une atmosphère sereine et jouissent des bienfaits de la civilisation la plus moderne, ne connaissent ni la haine, ni l’envie, pas plus que l’argent, ou le vieillissement. Conway apprend qu’il a été choisi par le Grand Lama (Sam Jaffe) pour assurer sa succession.

C’est au kiosque d’une gare que Frank Capra acheta le livre de de James Hilton, Horizons perdus, dont il avait entendu parler. Il le lut et en rêva toute la nuit. Enthousiaste comme jamais, il demande à Harry Cohn de lui en acheter les droits et lui annonce que le film devrait coûter dans les deux millions de dollars. Après réflexion, Harry Cohn, finalement convaincu, débloquera le budget souhaité, quatre fois supérieur à celui du film le plus cher jamais produit par Columbia à cette époque, et égal à la moitié du budget annuel de la société !
Jusque-là, l’œuvre de Capra est essentiellement réaliste. Pour cette incursion dans le genre fantastique, le cinéaste réalise un conte philosophique, teinté d’exotisme. Si le propos du film (humanisme, paix, solidarité…) est un classique de ses films, le réalisateur le porte à son paroxysme en dépeignant une utopie, un paradis terrestre. Alors que le nazisme monte et que la guerre gronde en Europe, le film de Capra, avec son appel à la préservation de la paix mondiale, sonne comme une prémonition. Mais les protagonistes ne sont pas tous sous le charme de cet eldorado, sans doute un peu trop lisse et aseptisé, certains veulent à tout prix le quitter, nostalgiques des heurts et des passions qui font le sel de la vie. La chute n’en sera que plus dure, faisant basculer le film dans sa partie dramatique.


HORIZONS PERDUS (1937)
Dans cet opus rare, aussi mythique que l’est Shangri-La, la mise en scène de Frank Capra est époustouflante. Toutes les scènes précédant l’arrivée à la lamaserie sont filmées avec un réalisme quasi documentaire : l’incendie, le survol de l’Himalaya, l’atterrissage en catastrophe, la marche épuisante dans les montagnes glacées… Ce rendu exceptionnel fait ainsi de Shangri-La, par contraste, un endroit encore plus irréel. Les décors sont flamboyants, bénéficiant désormais du charme suranné des années 1930.
La légende dit que Capra, réputé comptable hors pair, a toujours respecté ses budgets au centime près. Il a peu parlé de celui d’Horizons perdus. C’est Joseph McBride qui révèlera dans Frank Capra, The Catastrophe of Success (Simon and Shuster) que le budget déjà phénoménal sera dépassé d’un tiers, coûtant au réalisateur ses bonnes relations avec Harry Cohn et remettant en cause son indépendance au sein d’un studio que ses succès ont contribué à développer. Pour le biographe, « Lost Horizon a été une blessure que Capra s’est infligé à lui-même et qui devait causer un dommage durable à sa carrière. »

Mourir de joie
Capra cherchait pour le rôle du Grand Lama le visage inconnu d’un acteur très âgé. La perle rare est trouvée dans la vallée de San Gabriel : un acteur de théâtre de 90 ans, jamais filmé. Les bouts d’essai sont concluants, l’équipe appelle son domicile pour annoncer la bonne nouvelle. Mais l’acteur, à l’annonce de cet engagement par sa domestique, meurt subitement. Capra : « Le coup de fil tant attendu de Hollywood était arrivé. Il avait souri, et il avait rendu son dernier soupir. » (Frank Capra, Hollywood Story, Stock)

Décors récompensés
Le décorateur Stephen Goosson fut récompensé pour son travail exceptionnel sur Horizons perdus. Les magnifiques décors de Shangri-La ont été construits au sein de Burbank, le ranch de la Columbia.

Hangar et espadons
Afin de s’approcher d’une certaine réalité documentaire, Capra souhaite que les scènes de montagne et de neige soient filmées dans un froid réel. Avec son assistant, il font la découverte d’un hangar frigorifique isolé aux dimensions d’un petit studio : 25 mètres sur 50 et 8 mètres de haut ! Une heureuse découverte, suivie de celle des broyeuses de glace, fabriquant de la neige artificielle pour conserver les espadons congelés dans l’entrepôt. L’Himalaya en pleine banlieue.

Amputations
Le film a été plusieurs fois remanié, tantôt par le réalisateur, tantôt par Harry Cohn, patron de Columbia. Suppression du flashback, changement de fin… Les amputations seront réalisées même après la sortie du film. Les récits diffèrent, mais entre deux et six bobines sont retirées du film.

Horizons perdus (Lost Horizon )
États-Unis, 1937, 2h03, noir et blanc, format 1.37
Réalisation : Frank Capra  
Assistant réalisation : Charles C. Coleman
Scénario : Robert Riskin, d’après le roman Horizons perdus de James Hilton, avec la collaboration de Sidney Buchman  
Photo : Joseph Walker
Musique : Dimitri Tiomkin
Montage : Gene Havlick, Gene Milford
Décors : Stephen Goosson
Costumes : Ernest Dryden
Production : Frank Capra, Columbia Pictures
Interprètes : Ronald Colman (Robert Conway), Jane Wyatt (Sondra), Edward Everett Horton (Alexander P. Lovett), John Howard (George Conway), Thomas Mitchell (Henry Barnard), Margo (Maria), Isabel Jewell (Gloria Stone), H. B. Warner (Chang), Sam Jaffe (le Grand Lama), Hugh Buckler (lord Gainsford)

Sortie aux États-Unis : mars 1937 
Sortie en France : 9 avril 1937

FILM RESTAURÉ
Sony Pictures Entertainment
Park Circus

Ressortie en salle début 2015, par Park Circus

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