Posté le 17.10.2014 à 15h50
Des projections du chef-d’oeuvre de William Wyler, tout le weekend du festival.
Une histoire d’amour contrariée
Amis d’enfance, unis comme des frères, le romain Messala et le juif Judah Ben-Hur se retrouvent après plusieurs années de séparation. À la suite d’un désaccord d’ordre politique, les deux amis se brouillent, conduisant le Romain à haïr Ben-Hur au point de ruiner sa vie et celle de sa famille. Cette histoire de dispute sur fond de politique paraissait bien légère au réalisateur William Wyler pour donner à cette histoire de vengeance une grandeur épique. Il fit donc appel au scénariste Gore Vidal qui inventa un tout nouveau passé aux deux personnages : amants dans leur jeunesse, lui dit-il, ils se retrouvent des années plus tard. Messala souhaite reprendre la relation mais Ben-Hur refuse, provoquant ainsi la haine féroce de l’amoureux éconduit. La solution séduisit Wyler qui pourtant se garda bien de la partager avec son acteur principal, Charlton Heston, le sachant hostile à l’homosexualité. En revanche, Stephen Boyd (Messala) fut prévenu, et joua son rôle en conséquence. Prêtez attention aux regards passionnés en direction de son partenaire. Traquez ses sourires rêveurs et sa frénésie de contacts physiques.
Un vrai méchant de cinéma
Le Messala de Stephen Boyd vole d’ailleurs bien la vedette à Charlton Heston. Son jeu subtil, à la fois viril et vulnérable sous le poids du désir qu’il éprouve pour Ben-Hur, lui permet d’atteindre des sommets dans la vilénie. Ne serait-ce pas de Messala, que se seraient inspirés Ridley Scott et Joaquin Phoenix pour créer le terrifiant Commode dans Gladiator ? La grandeur du personnage tient aussi au fait que Messala n’atteindra pas de rédemption : en lui révélant le terrible sort subi par sa sœur et sa mère, il meurt, frappant une dernière fois son ennemi. Rejeté par l’être aimé, Messala sombre dans une mort digne des plus grandes tragédies.
Une mise en scène grandiose
En revoyant Ben-Hur, la modernité et le spectaculaire de la mise en scène de William Wyler surprennent. La course de chars, véritable moment de bravoure, prit 5 semaines de tournage et nécessita plus de 15 000 figurants ! Autre élément de taille qui permet au film de Wyler de traverser le temps sans paraître daté : la représentation de Jésus. Car ne l’oublions pas le sous-titre du roman de Lewis Wallace (1880) est bien « un récit du Christ ». Or, Wyler, contrairement à nombre de ses contemporains qui n’hésitent pas à reprendre d’insignifiants barbus aux cheveux longs et aux yeux bleus pour jouer ces Christs de second plan, décide de ne jamais montrer le visage de Jésus. On ne l’entend même jamais parler. Ainsi, il parvient à donner une véritable présence et résonnance à l’importance du Christ dans l’histoire de Ben-Hur. Toute la modernité de Wyler se donne à voir dans la scène de crucifixion : la musique s’arrête pour laisser entendre le bruit terrible des clous qui s’enfoncent dans la chair de l’inconnu à qui Ben-Hur doit la vie.
Mieux vaut revoir l’original avant… le remake !
Un nouveau Ben-Hur s’annonce à Hollywood sous les traits séduisants de Jack Huston (connu pour avoir joué dans la série Boardwalk Empire) sous la houlette du réalisateur Timur Bekmambetov (Abraham Lincoln : Chasseur de vampires). Toby Kebbell (La Planète des singes : l’affrontement) sera Messala, et Pedro Pascal (Game of Thrones) sera Ponce Pilate.
Elsa Colombani